
Né d’une séance d’analyse, Tokyo Santé n’est pas un projet comme les autres. Ce blog n’a pas vocation à informer ou convaincre, mais à faire entendre une parole symptomatique, décalée, hors des circuits officiels du soin. Un espace de latéralité, où l’écriture devient une manière de dire ce qui résiste aux discours dominants.
Tokyo Santé : le symptôme d’un autre discours
« Écrivez un livre. »
C’est ce qu’elle m’a dit, un jour, dans le silence feutré d’une séance.
J’ai écrit un blog.
Tokyo Santé est né là. Non pas comme un projet, mais comme un reste. Un résidu, une réponse déplacée à une injonction qui, elle-même, était peut-être déjà une interprétation. Il n’y a pas eu de livre. Il y a eu ce blog.
Et ce blog, je peux maintenant le nommer pour ce qu’il est : mon symptôme. Le mot symptôme fait souvent peur. Il évoque la maladie, ce qu’il faudrait éliminer.
Mais en psychanalyse, j’ai compris que le symptôme est une formation de l’inconscient, une manière dont le sujet parle sans le savoir, un mode d’inscription du réel dans le corps ou dans le langage.
Ce n’est pas un bug à corriger, c’est une énigme à écouter. Un nœud qui fait tenir quelque chose du sujet, souvent malgré lui.
Non pas un symptôme à éradiquer. Mais un lieu depuis lequel quelque chose insiste, s’écrit, se déplace. Un point d’ancrage subjectif, là où le discours dominant voudrait neutraliser toute position singulière.
Un symptôme d’écriture
Il ne s’agissait pas de faire un site professionnel. Ni de communiquer. Encore moins de convaincre.
Il s’agissait de tenir un espace. De faire tenir, dans un monde saturé de bienveillance en kit et de soins préfabriqués, une parole qui n’est ni lissée, ni commercialisable, ni immédiatement utile.
Tokyo Santé ne cherche pas à guérir. Il fait retour. Il retourne sur les scènes que j’ai vécues, dans le soin, dans la ville, dans les dispositifs de pouvoir doux qui traversent nos pratiques. Il retourne aussi à la parole, à ce qui ne trouve pas sa place dans les associations, les protocoles, les publications LinkedIn.
Un symptôme politique
Je n’ai pas voulu représenter. Je n’ai pas voulu incarner une autre version du “bon psy”, du psy visible, connecté, en réseau, engagé dans la parentalité ou dans les ateliers bien-être.
Mais je me suis aperçu qu’à Tokyo, prendre la parole autrement, c’est déjà déranger.
Ne pas s’aligner, ne pas participer aux jeux de cooptation douce, c’est déjà se tenir ailleurs.
Et c’est peut-être pour ça que ce blog est devenu un symptôme politique : parce qu’il ne cherche pas à intégrer, mais à pointer ce qui cloche.
Un symptôme qui ne veut rien pour les autres
Je ne cherche pas à être lu. Mais j’écris.
Je ne cherche pas à créer une nouvelle norme. Mais je m’autorise à faire entendre une dissonance.
Tokyo Santé n’est pas une solution. Ce n’est même pas une alternative.
C’est un espace de latéralité.
Un bord. Une fissure. Une écriture.
Un endroit où le discours ne tient plus tout seul, où quelque chose résiste à l’homogénéisation des pratiques, des images, des vérités.
Le symptôme comme réponse
C’est peut-être ça, au fond : le symptôme répond, là où le discours social, associatif, scolaire, thérapeutique, prétend tout prévoir.
Tokyo Santé ne répond à personne. Mais il répond de quelque chose.
De ce qui sature. De ce qui étouffe. De ce qui ne passe pas.
Et ce quelque chose, je le laisse surgir ici.
Sans nommer.
Sans dénoncer.
Mais en tenant bon — au bord du discours.
Le patient